Est-il préférable d’acheter ou de louer sa résidence principale ? Il s’agit d’un grand débat dans le monde des finances personnelles et du frugalisme.

Robert Kiyosaki, dans son célèbre livre « Père riche, Père pauvre » voit la résidence principale comme un passif qui coûte plus qu’il ne rapporte, et ne conseille donc pas de l’acheter. En tout cas, pas en priorité.

Jean-Sébastien Pilotte, auteur québécois du blog JeuneRetraite.ca et du livre « La retraite à 40 ans » pense également qu’il n’est pas rentable d’acheter sa résidence principale étant donné tous les coûts qu’elle peut potentiellement générer, contrairement à une location dont les frais mensuels sont fixes et donc connus à l’avance.

Pour creuser ces deux points de vues, je vous invite bien sûr à lire ces deux bouquins.

Pour ma part, j’ai un point de vue plus modéré sur la question. Beaucoup de paramètres entrent en effet en jeu dans cette décision d’acheter ou non sa résidence principale et comme pour tout investissement, nombre de ces paramètres ne peuvent être connus à l’avance, comme la progression du marché immobilier, la progression du marché boursier, le montant des travaux, etc.

Pour essayer de détricoter tout ça, je vais vous montrer comment calculer la rentabilité d’un achat par rapport à une location. Pour cela, je vais utiliser les chiffres de ma dernière opération immobilière à Montréal et les comparer avec un scénario « location ». Cela vous permettra de voir comment estimer la rentabilité d’un achat versus une location et pourra peut être vous aider dans votre décision.

Lisez bien jusqu’au bout car j’ai glissé un petit cadeau dans l’article 😉

Mais avant ça, je vais revenir sur mon expérience personnelle en immobilier, non pas qu’elle soit exceptionnelle, mais ayant déjà acheté deux fois ma résidence principale, mon parcours pourra peut être vous inspirer et pourquoi pas vous aider à prendre certaines décisions. 

 

Mon parcours en immobilier

Vous l’avez peut être déjà lu dans mon parcours personnel et financier mais un petit rappel ne fait pas de mal 😊 Je vais donc reprendre les grandes lignes de mon expérience pour vous donner une idée de mon point de vue sur l’achat immobilier.

En 2010, habitant à Paris depuis 2 ans, je décidai de passer à l’achat pour devenir propriétaire de mon premier bien immobilier. Je comptais faire de cet appartement ma résidence principale, mais je savais dès l’achat que ce ne serait que pour quelques années. J’évaluai alors mon budget par rapport à mon apport du moment (50 000 €) et de la mensualité de crédit que je pouvais débourser. Mais surtout, je souhaitais une mensualité qui serait remboursée par un loyer quand je mettrais ce bien en location dans les prochaines années. Cette mensualité serait donc d’environ 900 €, ce qui me donnait au final un budget d’environ 225 000 € frais de notaire inclus.

En quelques mois, je trouvai un appartement deux pièces de 34 m2 dans le 10e arrondissement de Paris. Il répondait à mes critères, je décidai donc de me lancer.

Je vécus 3 ans dans cet appartement avant de quitter Paris et de partir sur de nouveaux projets. Comme prévu à l’achat, je mis donc mon appartement en location et depuis 8 ans maintenant je possède donc un bien qui s’autofinance et qui a pris plus de 70% de plus value.

Ma seconde expérience avec l’immobilier a été l’achat d’un appartement à Montréal, 3 ans après mon arrivée en 2018. Ma conjointe et moi souhaitions acheter notre résidence principale, mais une nouvelle fois, nous savions que ce ne serait que pour quelques années.

Nous nous sommes alors engagés pour un terme de 3 ans. Etant donné les frais de notaire très bas ici au Québec comparé à la France (moins de 2% contre 8% du prix du bien en France), j’étais convaincu qu’il s’agissait d’une bonne opération malgré le temps de possession de 3 ans qui est considéré court pour un achat immobilier. 

Nous avons donc défini notre budget selon notre apport du moment (63 000 $), fait en sorte d’avoir 20% d’apport pour éviter de payer l’assurance SCHL, et avons défini des mensualités maximum assez faibles pour pouvoir continuer à dégager une épargne importante à côté. Nous payions donc environ 1100 $ par mois d’hypothèque.

En quelques semaines de recherches, nous avons trouvé un magnifique appartement refait à neuf qui a été un vrai coup de coeur. Nous avons fait une offre rapidement en négociant de 10000 $, l’offre a été acceptée et nous avons signé au prix de 315 000 $.

3 ans plus tard, au terme de la période prévue, et dans un marché immobilier complètement fou, nous avons revendu cet appartement 460 000 $, soit 46% de plus value en 3 ans 😱🤩

A la lecture de ces 2 expériences on pourrait conclure rapidement et se dire « Mais bien sûr qu’il faut acheter sa résidence principale!! » 😊

Mais la réponse doit être nuancée car ces expériences ne peuvent être considérées comme la norme.

La rentabilité d’un achat immobilier dépend en effet de nombreux paramètres que je vais maintenant détailler en utilisant l’exemple de ma seconde opération immobilière à Montréal. Je vais en même temps comparer le tout avec un scénario « location » d’un bien équivalent pour vous aider à voir les différences entre les deux options.

C’est parti, on sort les calculatrices!

Comparaison Achat vs Location

 

Alors, comment évaluer la rentabilité d’un achat par rapport à une location ? 

Vous trouverez peut être différentes manières de le faire sur internet, chacun le faisant un peu à sa sauce. De mon côté, je vais vous proposer une façon de procéder mais je ne la considère pas comme la vérité absolue. Je ne suis pas comptable, il y a donc peut être des termes et notions à apporter que je ne connais pas, et j’y propose des choix et des paramètres assez subjectifs qui en feront peut être réagir certains.

N’hésitez donc pas à me donner votre avis dans les commentaires pour en discuter.

 

Voici donc selon moi les trois étapes importantes pour estimer l’intérêt d’un achat par rapport à une location :

 

  1. Définir la période de temps. Il s’agira dans un premier temps de déterminer sur combien d’années vous voulez comparer les deux scénarios. Les frais fixes étant différents entre un achat et une location, il peut être nécessaire d’estimer la rentabilité à 5 puis 10 puis 20 ans selon la durée prévue de votre projet. Un achat étant souvent plus rentable avec le temps.
  2. Identifier les dépenses de chaque scénario sur la période. Dans le cas de la location, il s’agira du loyer mensuel + d’éventuels frais d’agence, et dans le cas de l’achat, de tous les frais fixes à l’achat (frais de notaire principalement), des frais fixes après l’achat (charges de copropriété, taxes, intérêts d’emprunt, etc) ainsi que d’une estimation des frais imprévus (réparations diverses, travaux, frais de vente, etc)
  3. Estimer les revenus de chaque scénario sur la période. Dans le cas de l’achat, il s’agira d’estimer de combien le marché immobilier se valorisera dans les années futures, et dans le cas de la location, combien la mise de fonds que vous aviez prévue pour l’achat vous rapporterait si vous la placiez en bourse par exemple. Il faut également inclure ici la différence de coût mensuel entre l’achat et la location (ex : si vous déboursez 1500 €  par mois en achetant alors que vous débourseriez 1200 € en louant, cette différence de 300 € placée en bourse chaque mois vous rapporterait quelque chose qu’il faut considérer) 

      Vous voyez donc qu’il y a beaucoup d’estimations à faire dans ces paramètres! C’est bien pour cette raison que la question n’est pas si simple à répondre 😊

      Je vais maintenant procéder à ces 3 étapes avec les chiffres de ma dernière transaction.

      Pour commencer, je vais me baser sur la période de 3 ans pendant laquelle ma conjointe et moi avons été propriétaires du bien.

      Notez qu’il s’agit là d’un bilan a posteriori, je n’ai donc dans mon cas aucune information à estimer étant donné que je peux me baser sur ce qui s’est réellement produit, mais je mettrai une * dans le cas où le montant ne peut être exactement connu avant de passer à l’achat.

      C’est parti!

       

      Les dépenses

       

      Voici les dépenses que nous avons eu à faire pour notre appartement montréalais :

      Dépenses sur 3 ans Scenario Achat - Montant Scenario Location - Montant
      Loyer (1500$ / mois) 54000
      Frais de notaire 1200
      Charges de copropriété 4752
      Taxe Bienvenue 3200
      Taxes municipale et scolaire 8700
      Intérêts + assurance sur prêt hypothécaire 19320
      Capital remboursé sur prêt hypothécaire 21200
      Frais divers vente * 3000
      Frais divers réparation * 500
      TOTAL 61872 54000

      On remarque que les dépenses liées à l’achat ont été légèrement plus importantes qu’une location.

      Quelques notes :

      • la mise de fonds n’apparaît pas dans ce tableau car je ne la considère pas comme une dépense. Il s’agit simplement d’une somme immobilisée que l’on conserve dans notre actif.
      • j’inclus par contre le capital remboursé du prêt hypothécaire. Cette somme n’est pas une dépense en tant que telle car c’est de l’argent qui reste également dans notre actif, mais je l’inscris ici pour avoir une idée de la somme que nous avons eu à débourser sur 3 ans. Pour la comparer ensuite avec la location.

       

      Les revenus

       

      Voici maintenant les revenus perçus sur ces 3 ans : 

      Revenus sur 3 ans Scenario Achat - Montant Scenario Location - Montant
      Capital remboursé sur prêt hypothécaire 21200
      Plus value à la revente * 145000
      Gain sur mise de fonds placée en bourse (sur la base d'un rendement de 7% annuel) * 14178
      Épargne dégagée grâce à la location et placée en bourse * 7920
      TOTAL 166200 22098

      Ici, le scenario Achat explose le scenario Location grâce à la plus value exceptionnelle que nous avons faite.

      Quelques notes :

      • J’inclus à nouveau le capital remboursé sur le prêt hypothécaire car en l’intégrant dans les dépenses et les revenus, le bilan final est de 0, ce qui traduit bien le statut de cet argent qui reste dans notre actif. L’inclure des deux côtés permet cependant d’avoir une trace de cette somme.
      • J’estime le gain potentiel en bourse à 7%, ce qui représente un rendement moyen sur les différents marchés boursiers mondiaux plausible comparé à l’historique des marchés
      • L’épargne dégagée grâce à la location correspond à la différence des dépenses des deux scénarios (7172 $), que j’ai divisée par 36 pour simuler une épargne mensuelle (période de 36 mois). Ce qui donne environ 200 $ d’épargne mensuelle, placée en bourse au taux de 7% également.

       

      Voici maintenant les bilans des deux scénarios :

      Bilan sur 3 ans Scenario Achat - Montant Scenario Location - Montant
      Revenus 166200 22098
      Dépenses 61872 54000
      TOTAL 104328 -31902

      Au final, on se rend donc compte que notre achat a été une opération très intéressante!

      Mais ATTENTION cela ne veut pas dire que tout achat sera aussi rentable.

      Dans notre cas, nous avons profité de divers facteurs qui ont joué en notre faveur :

      • Une flambée du marché immobilier qui nous a permis de faire une plus value incroyable de 46%. Dans un marché plus « normal », une plus value de 10% aurait été réaliste. Dans ce cas, le bilan de l’achat aurait été de -8 000 $! Cela serait resté plus intéressant que la location mais nettement moins bénéfique à notre portefeuille 😊
      • Aucun travaux personnels. Notre appartement avait été refait presque entièrement 2 ans auparavant, avec goût en plus. Cela nous a permis de ne refaire aucun travaux ni réparation, et en plus de déclencher un effet « Wahou » lors de la revente (le même effet que nous avions eu lors de notre achat 😊) et ainsi d’encourager les surenchères.
      • Aucun travaux majeurs dans la copropriété. Il s’agit d’une copropriété construite en 2004, en bon état donc et sur la période de 3 ans, aucun gros travaux n’a été entrepris.
      • Frais de notaire très bas. En France, les frais de notaire représentent environ 8% du prix du bien. Au Québec, nous avons payé seulement 1.4% de frais à l’achat entre le coût du notaire et la taxe de Bienvenue. C’est un avantage non négligeable du marché québécois.

      A vous de jouer maintenant !

       

      En détaillant notre opération, j’ai voulu illustrer les calculs et les critères à prendre en compte  dans les deux scenarios qui s’offrent à vous, achat ou location. Vous pourrez alors reproduire ce type de calcul avant de passer à l’achat. Mais bien entendu, vous devrez remplacer certaines données par vos propres estimations. En particulier, voici les valeurs que je préconise pour estimer de manière prudente les données manquantes  :

      • La plus value à la revente. Considérer une progression du marché immobilier de 3% par an
      • Le montant des réparations et travaux. Prévoir un montant annuel pour travaux et réparations d’environ 1% du prix du bien 
      • Les frais de vente. Compter 5% du prix du bien pour les frais d’agence lors de la revente.
      • Le montant que votre mise de fonds pourrait vous rapporter. Estimer le rendement annuel du marché boursier de 5 à 7%

      Avec tout ça, vous devriez pouvoir comprendre et reproduire les calculs pour votre cas personnel si besoin.

      Cependant, si vous n’avez pas l’âme d’un mathématicien, je vous ai développé un petit outil  Excel pour vous aider 😊

      Il s’agit d’une 1ere version, je suis conscient qu’elle peut être améliorée (ajout des données du prêt hypothécaire, comparaison de plusieurs périodes en une seule fois, etc) et je compte le faire quand j’aurai un peu plus de temps . En attendant, je pense qu’elle est utilisable en l’état, elle vous demandera juste un peu plus de calculs de votre côté 😊

      N’hésitez pas à me dire dans les commentaires ce que vous en pensez et ce que vous aimeriez voir comme améliorations!

      Et si vous avez une question sur son fonctionnement, n’hésitez pas à me la poser.

      Cliquez sur le bouton pour télécharger le fichier : 

      En conclusion

       

      Mon avis final sur la question d’acheter ou non sa résidence principale est donc « ça dépend » 😊

      En particulier, j’encourage l’achat de la résidence principale si les conditions suivantes sont réunies :

      • si la rentabilité calculée plus haut est plus intéressante à l’achat qu’à la location. Ou tout du moins assez proche.
      • si l’endettement que l’achat vous apportera par rapport à la location ne vous empêche pas d’épargner en parallèle (je conseille de ne pas dépasser 30% d’endettement en incluant tous les frais mensuels liés à l’achat) surtout si vous visez l’indépendance financière à terme.
      • si la mise de fonds que vous immobiliserez en achetant ne correspond pas à une trop grosse partie de votre argent disponible (pas plus de 30% idéalement) afin, dans un souci de diversification, de ne pas « mettre tous vos oeufs dans le même panier ».
      • si le marché immobilier de votre ville ou de votre quartier a du potentiel. Cela est difficile à estimer avec certitude mais certains critères peuvent vous orienter (niveau d’attractivité globale, réhabilitation de quartiers, lignes de transport à venir, pôle d’affaires en construction, etc)
      • si votre achat n’est pas totalement guidé par l’affect. L’aspect affectif est à considérer dans un achat de résidence principale, c’est certain. Pour de nombreuses personnes, moi inclus, acheter ou non sa résidence principale ne repose pas uniquement sur des critères de rentabilité. Avoir son chez-soi, développer son patrimoine, construire un petit nid pour sa famille sont des sentiments importants à considérer. Cependant, il est important je pense de ne pas décider qu’en termes affectifs mais de prendre en compte les quatre points précédents. Surtout si on vise l’indépendance financière à terme.

      En résumé, je ne pense pas qu’il faille être propriétaire de sa résidence principale « à tout prix« , mais que cela peut être très intéressant dans certains cas, dans certaines villes, et dans un marché à potentiel.

      De plus, le critère affectif est important mais celui-ci ne doit pas totalement faire oublier l’importance d’être rentable par rapport à une location et de faire attention à la place qu’un achat prendrait dans votre actif net et dans votre budget mensuel.

      J’espère vous avoir éclairé, à vous de jouer maintenant! 💪😊

      A bientôt,

       

      Votre dévoué Frugalman 🚀

       

      Que pensez-vous de cette façon de calculer la rentabilité d’un achat vs une location ? Avez-vous d’autres critères à considérer ?

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